Pierre Legendre

Successeur de Jean Gaudemet à la direction d'études "Histoire du droit canonique", il en fait modifier le titre en "Espaces canoniques du christianisme occidental".

Pendant vingt années, son enseignement à la section des Sciences religieuseslui donne l’occasion de développer et d’approfondir les concepts clés de sa réflexion sur les racines juridiques de la civilisation occidentale. Historien de la tradition romano-canonique médiévale avec une thèse sur la pénétration du droit romain dans le droit canonique classique, Pierre Legendre se destine à l’étude des manuscrits juridiques des XIIe et XIIIe siècles dont il souhaite dresser un catalogue raisonné. Dans cet esprit il édite et publie, en 1973, le manuscrit de l’un des premiers commentaires médiévaux sur le droit romain. Cette édition changera fondamentalement un siècle de connaissances sur la diffusion du droit romain dans l’Europe médiévale. C’est au même moment qu’il développe les bases conceptuelles et méthodologiques d’une réflexion originale et rigoureuse sur ce qu’il définit comme la « civilisation du droit civil » dont il présente les premiers arguments dans un ouvrage provocateur sur « L’amour du censeur ». Dans ce livre se révèle pour la première fois la triple essence historique, juridique et psychanalytique d’une pensée multiforme et rebelle aux catégories traditionnelles du savoir. En 1983, La publication de « L’empire de la vérité » sur le rôle de la fonction dogmatique dans le système industriel inaugure une série d’ouvrages, issus des leçons dispensées dans le cadre de sa direction d’étude, dans lesquels il n’aura de cesse de mettre à jour les montages dogmatiques de la civilisation occidentale. Son style souvent polémique pour dénoncer des compromissions du savoir dans les sociétés contemporaines ne saurait faire oublier le profond humanisme au cœur de sa pensée dont il résume ainsi le but : « Je m’occupe d’un entre-deux mondes qu’on désigne sous le nom d’institutions, espèce de faille remplie de merveilles poétiques et d’horreurs, entassement de vies humaines, ficelées entre elles pour le bonheur et l’hécatombe ».