Paul Dibon

Les travaux de Paul Dibon ont marqué l'histoire des idées par la méthode originale qui fut la sienne et qui consistait à prendre en compte systématiquement tous les types de témoignages sur la diffusion des grandes œuvres philosophiques pour expliquer les raisons de leur prééminence. Partant du principe qu'il fallait pour cela restituer les «conditions intellectuelles de la vie intellectuelle» d'un lieu et d'une époque donnés, ses travaux se sont attachés à étudier des auteurs «secondaires» et des sources jusque-là négligées, comme les thèses et disputes universitaires, les correspondances, les journaux, les catalogues de bibliothèque, les carnets de voyage, etc. En choisissant comme terrain d'étude le carrefour intellectuel de l'Europe que constituaient alors les Pays-Bas au XVIIe siècle, ses recherches ont pu mettre en évidence la circulation des idées et l'importance des réseaux de communication entre savants dans toute l'Europe de ce temps. Sans s'écarter des penseurs majeurs, Paul Dibon s'est ainsi appliqué à montrer comment la diffusion d'une philosophie – en particulier celle de Descartes – avait pu être à la fois préparée, fécondée et amplifiée par sa réception aux Pays-Bas, dans les milieux aussi bien savants qu'extérieurs à l'université. Pionnière en son temps, l'œuvre de Paul Dibon a non seulement ouvert la voie à des recherches nouvelles, mais elle a également contribué à poser des règles méthodologiques essentielles pour comprendre la généalogie d'une pensée, son développement et sa postérité et construire une véritable histoire des filiations intellectuelles.