Jacques Le Brun était marié en premières noces à Marie-Elisabeth Milcent, décédée en 1983, avec laquelle il a eu trois enfants: Jean-Baptiste (né en 1960), Sophie (née en 1961) et Mathilde (née en 1966).
En secondes noces, il a épousé la philosophe et psychanalyste Annie Tardits.
Après quelques années passées au Cours Désir, à Paris, Jacques Le Brun poursuit sa scolarité à Moulins (Allier), où ses parents s’installent pendant la guerre. Il y obtient son baccalauréat. Rentré à Paris et ayant fait ses classes préparatoires au lycée Henri-IV, il obtient l’agrégation de Lettres, puis enseigne à Oran, en Algérie.
Dès 1953, il est l’élève de Jean Orcibal à la section des Sciences religieuses de l’EPHE. Il y côtoie nombre de clercs, provenant de sociétés de prêtres, désireux de revenir à leur origine bérullienne ; il y rencontre aussi un jésuite, Michel de Certeau, qui deviendra un ami proche, menant une recherche semblable sur Favre, le compagnon d’Ignace. Il obtient le diplôme de l'EPHE en 1956, avec une étude sur Bossuet et les psaumes, dont il donne un résumé dans l'Annuaire de l'EPHE-SR.
Dans la même période, il suit aussi les séminaires d’Henri Gouhier à l’Institut de Philosophie de la Sorbonne.
En 1956-1959, il est pensionnaire de la Fondation Thiers.
C’est sous la direction de René Pintard qu’il soutient sa thèse de doctorat. Celle-ci sera publiée chez Klincksieck en 1972 sous le titre La Spiritualité de Bossuet.
Jacques Le Brun a succédé à Jean Orcibal en 1978 à la section des Sciences religieuses de l'EPHE. Il y a enseigné jusqu'en 2000.
Enseignant à la Faculté de Lettres de l’Université de Poitiers, puis au CNED.
Les recherches de Jacques Le Brun ont porté sur la littérature spirituelle dans le christianisme moderne, en particulier sur la mystique au XVIIe siècle. Spécialiste de Bossuet, Fénelon, Madame Guyon, Richard Simon, Angelus Silesius, il a inscrit leurs écrits et les questions qu’ils soulèvent dans une histoire longue allant de la philosophie antique à la psychanalyse. Un fil rouge parcourt ses travaux : les impensables qui font penser, tels le pur amour ou l’abdication.
Il commença ses séminaires par une étude sur Richard Simon, figure majeure de l’exégèse du XVIIe siècle, dont il publia un travail inédit (1983), et les termina en 2000 en revenant à Angelus Silesius, « un converti de la Réforme à la Contre-Réforme », poète mystique auquel il consacra ses dernières forces (Dieu, un pur rien, 2019).
Avec Jean Orcibal, puis après lui, il mena à son terme, en compagnie du sulpicien Irénée Noye, l’édition de la Correspondance de Fénelon (17 volumes, 1972-2007). Seul, dans le même temps, il fit de Fénelon un auteur digne d’entrer dans la Pléiade (2 volumes, 1983 et1997). À travers Fénelon, Jacques Le Brun est devenu un spécialiste de la mystique dont il explora le cœur dans un livre magistral, Le Pur Amour de Platon à Lacan (2002) auquel La Croix se fit l’écho par une longue interview (La Croix du 3 septembre 2002).
De la philosophie grecque à Jacques Lacan : Impossible de résumer un tel ouvrage qui d’abord restitue l’ultime débat théologique du XVIIe siècle finissant autour de l’amour désintéressé que l’on peut porter à Dieu jusqu’à la privation extrême de sa présence. Il lui donna une autre dimension en élargissant l’enquête de la philosophie grecque (Platon) à la psychanalyse (Lacan), son intérêt pour cette discipline l’ayant conduit à participer à la formation de l’École de psychanalyse Sigmund
Freud (1994). Ce livre exigeant est de ceux qui se laissent interroger à chaque relecture. Ainsi, de ces lignes : « Réfléchir aussi sur la place de la femme dans la mystique (…), sur la crucifixion sans rédemption qui est la destinée de ces femmes. » Il savait de quoi il parlait, comme le montrent ses biographies spirituelles de mystiques du XVIIe, réunies sous un titre sobre, Sœur et amante (2013). Historien aux curiosités innombrables, il publia encore un essai sur la déchéance volontaire, intitulé Le pouvoir d’abdiquer (2009), réflexion historique toute séculière sur l’abandon du pouvoir par les responsables politiques.
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I. Livres
- Les Opuscules spirituels de Bossuet. Recherches sur la tradition nancéienne, Nancy : Faculté des Lettres, Mémoires, n° 38, 1970.
- Bossuet, Bruges-Paris : Desclée de Brouwer, « Les Écrivains devant Dieu », 1970.
- La Spiritualité de Bossuet, Paris : Klincksieck, « Bibliothèque française et romane, publiée par le Centre de philologie et de littérature romanes de l’université des sciences humaines de Strasbourg », série C, Études littéraires, n° xxxix, 1972.
- La Spiritualité de Bossuet prédicateur, Paris : Klincksieck, 2002.
- Le Pur Amour de Platon à Lacan, Paris : Seuil, « La Librairie du XXIe siècle », 2002 ; trad. esp., Cordoba, Ediciones Literales, 2004.
- La Jouissance et le Trouble. Recherches sur la littérature chrétienne de l’âge classique, Genève : Droz, « Titre courant », 2004.
- Le Pouvoir d’abdiquer. Essai sur la déchéance volontaire, Paris : Gallimard, 2009.
- Sœur et amante. Les biographies spirituelles féminines du xviie siècle, Genève : Droz, coll. « Titre courant », 2013.
- Dieu, un pur rien. Angelus Silesius. Poésie, métaphysique et mystique, Paris : Seuil, « La librairie du XXIe siècle », 2019.
- Jésus-Christ au XVIIe siècle, en préparation.
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II. Éditions critiques
- Bossuet, Politique tirée des propres paroles de l’Écriture Sainte, Genève : Droz, « Les Classiques de la pensée politique », 1967.
- Richard Simon, Additions aux Recherches curieuses sur la diversité des langues et religions, en coll. avec John D. Woodbridge, Paris : PUF, « Bibliothèque de l’École des hautes études », 1983.
- Fénelon, Œuvres, Paris : Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », t. I, 1983 ; t. II, 1997.
- Fénelon, Les Aventures de Télémaque, Paris : Gallimard, « Folio classique », 1995.
- Léon de Modène et Richard Simon, Les Juifs présentés aux chrétiens, en coll. avec Guy Stroumsa, Paris : Les Belles Lettres, « La Roue à livres », 1998, rééd. 2004.
- Fénelon, Correspondance, éd. Jean Orcibal, en coll. avec I. Noye, Genève : Droz, t. VI et suiv., 1987-2007
- III. Articles ou chapitres de livres collectifs : https://www.cairn.info/revue-le-genre-humain-2009-1-page-197.htm )
- IV. Contibutions parues dans l'Annuaire de l'EPHE-SR, autres contributions en accès libre: https://www.persee.fr/authority/387844
Jacques Le Brun a joué un rôle important dans le « Groupe de La Bussière », fondé en 1960 par de jeunes historiens laïcs, surtout médiévistes et modernistes, désireux de fonder l’histoire religieuse sur des bases universitaires. Il a participé à leurs réunions annuelles dès 1961. Il est de ceux qui ont assuré le passage de relais à la génération des années 1970, davantage attentive à réfléchir sur les manières de « Faire de l’histoire » religieuse.
Au début des années 1990, il a participé à la formation de l’École de psychanalyse Sigmund Freud, dont il est resté un membre très actif.
L’impensable qui fait penser. Histoire théologie psychanalyse. Pour Jacques Le Brun, sous la direction de Pierre-Antoine Fabre, Annie Tardits et François Trémolières, « Le genre humain » n°48, Seuil, janvier 2009.
https://www.en-attendant-nadeau.fr/2019/06/04/rose-raisons-silesius/
https://mystiquefigures.com/2016/06/19/entretien-sur-la-mystique-avec-jacques-le-brun/
Nécrologie dans La Croix, par Claude Langlois.
Nécrologie dans Le Monde, par Jean-Philippe Catinchi.
Nécrologie dans Libération, par Dominique Kalifa.
François Trémolières, « Jacques Le Brun (1931-2020). Critique textuelle et histoire de la spiritualité », Dix-septième siècle, 2021/1 (n° 290), p. 169-179. https://www.cairn.info/revue-dix-septieme-siecle-2021-1-page-169.htm