Son père, Jean Laville, est gérant de petites entreprises. Il a été intoxiqué par les gaz de combat pendant la guerre de 1914. Sa mère, Suzanne Balleux, est femme au foyer.
En 1957, il se marie avec Nicole Trinquand, secrétaire à la Sécurité Sociale puis aide-documentaliste au Centre de documentation du Planning familial. Ils ont 5 enfants, nés entre 1958 et 1965.
Antoine Laville prépare son baccalauréat au lycée Voltaire à Paris. Après une préparation au concours d’HEC, il se réoriente vers des études de médecine.
En 1958-1959, il occupe un poste de FFI (Fait fonction d’Interne) à l’Hôpital de Nanterre. Il obtient des vacations au Laboratoire de Physiologie du Travail, dirigé par Camille Soula puis par Jean Scherrer, laboratoire du Centre National des Arts et Métiers (CNAM).
1960-1962 : Service militaire. Médecin des pompiers de Paris.
En 1962, il soutient sa thèse de Doctorat en Médecine intitulée « Coût énergétique du travail statique » et réalisée sous la direction d’Hugues Monod et Simon Bouisset.
En 1962-1963, il travaille à plein temps au Laboratoire de Physiologie du Travail. Il entreprend une formation complémentaire en Psycho-physiologie et Médecine du travail.
En 1989, Antoine Laville quitte le CNAM et entre à l’EPHE où il succède à Jacques Leplat qui dirigeait le Laboratoire de Psychologie du Travail depuis 1966. Il lui donne son nouvel intitulé : « Laboratoire d’Ergonomie Physiologique et Cognitive ».
En 1991, il associe le Laboratoire à la création, à l’initiative de Serge Volkoff , du GIP CREAPT (Centre de Recherches sur l’Âge des Populations au Travail) spécialisé dans les relations Vieillissement-Travail et regroupant plusieurs laboratoires universitaires et entreprises.
De 1991 à 2001, Antoine Laville est responsable du Diplôme d'Études Approfondies (DEA) National d’Ergonomie qui repose sur les enseignants du laboratoire EPHE et des laboratoires d’ergonomie du CNAM, de Toulouse, de Bordeaux et de Paris 5.
Tout au long de sa carrière, Antoine Laville assure la direction de thèses (dont certaines avec Annie Weill-Fassina, Maître de conférences de l'EPHE dans ce laboratoire). Certains de ses doctorants deviendront enseignants-chercheurs en France, au Québec ou au Brésil.
Antoine Laville est le dernier à avoir dirigé à Paris, au 41 rue Gay-Lussac, ce Laboratoire de l’EPHE créé en 1930, avec sa bibliothèque qui avait conservé son indépendance par rapport aux autres institutions. À sa retraite, le laboratoire a été délocalisé au Laboratoire de psychologie du travail de l’Université de Toulouse, dirigé par Jean-Marie Cellier.
1963-1968 : Stagiaire, puis Attaché de recherches au CNRS.
1968-1979 : Enseignant au Laboratoire d’ergonomie du CNAM, dirigé par le Pr Alain Wisner (1966 -1989). En 1968, il constitue une équipe avec Catherine Teiger (chercheur CNRS) et Jacques Duraffourg à laquelle se joindra François Daniellou vers 1980.
1979-1989 : Sous-Directeur du Laboratoire d’ergonomie du CNAM.
1964 : mise en place avec Renée Desmaris, psychologue, d’un processus de sélection-orientation des futurs formateurs, le dispositif PSYCHOREC, qui multipliait les formes d’interactions avec les candidats formateurs, pour dépasser les limites des processus habituels de sélection.
1987-1989 : Président de la Société d'Ergonomie de Langue Française (SELF).
1991 : Participation à la transformation des Cahiers de la Mutualité en revue Santé et travail, et présidence du conseil scientifique.
1998 : Organisation du Congrès de la SELF avec le Laboratoire d’Ergonomie du CNAM : « Temps et Travail ».
Médecin du travail de formation, chrétien social démocrate par conviction, Antoine Laville, ayant constaté que la médecine occultait le rôle des conditions de travail dans l’origine, le développement et le traitement des pathologies, a été l’un des premiers ergonomes à consacrer ses recherches aux relations entre conditions de travail et santé des travailleurs dans l’objectif pratique de leur amélioration. Trois phases marquent l’évolution de ses recherches :
– 1958-1963 : Elles se situent dans le cadre d’études expérimentales en physiologie du travail sur les relations Travail musculaire – Santé (fatigue). Sous la direction des Pr Monod et Bouisset, elles portent sur la biomécanique du mouvement et l’évaluation du travail musculaire statique.
– 1963-1988 : Après sa rencontre avec Alain Wisner, ses recherches portent sur diverses relations conditions de Travail (salarié) – Santé en réponse à des demandes syndicales provenant de différents secteurs (électronique, confection, cheminots, téléphonistes, rotativistes), à des besoins de la médecine du travail (chimie) ou de directions (forage de pétrole), qui sera sa seule recherche sur demande patronale.
Le travail sur le terrain est dominant et innovant. Les conditions d’analyse sont difficiles car, au début, les directions n’autorisent pas l’entrée dans les ateliers et tout se fait à l’extérieur avec des volontaires, ce qui ne répond pas aux critères scientifiques habituels et sera critiqué. Une panoplie de techniques innovantes est cependant mise en place : observation participante, entretiens individuels et de groupe sur le travail réel et les consignes, observations systématiques papier-crayon de séquences gestuelles et des postures, enregistrement de paramètres physiologiques. La formation de membres des sections syndicales locales concernées établit la confiance et leur permet de suivre la recherche, de se l’approprier pour pouvoir agir par la suite sur les transformations souhaitées.
Différents types de pénibilité sont explorés : le travail répétitif sous cadence imposée (1966-1977), l’âge et le vieillissement au travail (1966-1979), les horaires postés et le travail de nuit (1970-1984), et les nouvelles technologies (1977-1988).
Jusqu’en 1975, des expérimentations en laboratoire se focalisent sur l’analyse de comportements spécifiques ayant posé question lors des observations de terrain. Elles concernent la monotonie au travail, la charge de travail, le conflit rapidité-précision et immobilisation posturale, l'exploration visuelle, les modalités d’apprentissage de tâches spatiales en fonction de l’âge.
– De 1980 jusqu'à son départ en retraite, l’âge et le vieillissement au travail en rapport avec le type de travail et les conséquences sur la santé redeviennent les thèmes sur lesquels Antoine Laville s’investit, surtout à l’EPHE. Il montre, dans le travail, la combinaison de processus de déclin dû à l'âge et de construction de nouveaux modes d'activité liés à l'expérience.
Ouvrages
Laville A., Teiger C., Wisner A., Age et Contraintes de Travail. Aspects sociologiques, psychologiques, physiologiques, Paris, NEB Éditions Scientifiques, 1975.
Laville A., L’Ergonomie, Paris : PUF, 1975, 128 p.
Laville A., Teiger C., Boutin J., Etxezaharreta L., Pinsky L., See N., Theureau J., Les Rotativistes. Changer les conditions de travail, Paris : ANACT, 1982, 344 p.
Guérin F., Laville A., Daniellou F., Duraffourg J., Kerguelen A., Comprendre le travail pour le transformer, la pratique de l’Ergonomie, Paris : ANACT, Collection Outils et Méthodes, 1991, 233 p.
Chapitres d'ouvrages
Laville A., Pailhous J., « Les activités visuelles dans l’apprentissage des tâches visuelles. Quelques perspectives d’application », dans A. Laville , C. Teiger, A. Wisner (éd.), Age et contraintes de travail, Paris : NEB Éditions Scientifiques, 1975, 308-322.
Laville A., « Postural reactions related to activities on VDU », in E. Grandjean – E. Vigliani (ed.), Ergonomics aspects of visual display terminals, Londres : Taylor & Francis, 1980, 167-175.
Laville A., « Cooperation between ergonomists and workers in the study of posture in order to modify work conditions », in N. Corlett, J. Wilson, I. Manenica (ed.), The Ergonomics of working posture, Londres : Taylor & Francis, 1986, 293-307.
Laville A., « Travail et âge. De la recherche à l’action », dans J. M. Marquié, D. Paumés et S. Volkoff (éd.), Le travail au fil de l’âge. Toulouse : Octarès Editions, 1995, 439-450.
Cassou B., Laville A., « Vieillissement et travail : cadre général de l’enquête ESTEV », in Derriennic F., Touranchet A, Volkoff S. (éd.), Age, Travail, Santé. Paris : INSERM, 1996, 13-31.
Volkoff S., Laville A., Molinie A. F., Maillard. M. C., « Age et difficultés dans le travail : une analyse statistique en termes de parcours », dans F. Derrienec, A. Touranchet, S. Volkoff (éd.), Age, Travail, Santé, Paris : INSERM, 1996, 77-89.
Gaudart C., Laville A., « Ageing and ways of regulating work : the case of repetitive tasks under pressure of time » , in J. M. Marquié, D. Paumès, S. Volkoff (ed.), Working with age, Londres : Taylor and Francis, 1998, 249-266.
Laville A., « Work and age, from research to action », in J. M. Marquié, D. Paumès, S. Volkoff (ed.), Working with age, Londres : Taylor and Francis, 1998, 335-344.
Laville A., Volkoff S., « Fragilités et ressources des travailleurs vieillissants », dans P. Abecassis et P. Roche (dir.), Précarisation du travail et lien social, Paris : L’Harmattan, 2001, 125-136.
Laville A., Volkoff S., « Vieillissement et travail », dans P. Falzon, Ergonomie, Paris : PUF, 2004, 145-156.
Dans les années 1960 : Engagement dans le syndicalisme étudiant et les mouvements contre la guerre d’Algérie et la torture.
Engagement à la JOC (Jeunesse Ouvrière Catholique), avec notamment Alain Letty et Dominique Alunni (fondateur de l’INFAC-CCO, Institut national de formation d’animateurs de collectivités du Centre de culture ouvrière).
En 2004, après son décès, la municipalité de Fresnes lui a dédié l’exposition « C’est quoi ton travail ? » à l’Écomusée de la ville.
- Entretien avec Antoine Laville mené en 2000 par Catherine Teiger, dans le cadre de la Commission d’Histoire de la SELF : https://ergonomie-self.org/wp-content/uploads/2020/09/laville-antoine.pdf.
- https://maitron.fr/spip.php?article239580 Notice « LAVILLE Antoine, Albert » par François Daniellou, version mise en ligne le 24 mars 2021, dernière modification le 5 mai 2021.