Fils d’un peintre (Alfred Chagniot) et d’une institutrice passée ensuite au collège.
En 1990, l’EPHE qui lui ouvre ses portes, il y exerce son enseignement et ses directions de recherche jusqu’à sa retraite.
La large contribution de Jean Chagniot au deuxième tome de l’Histoire militaire de la France sous la direction d’André Corvisier (1992) l’a confirmé dans sa place de dix-huitiémiste le plus important en histoire militaire. Le travail de synthèse fait aussi la part belle à l’utilisation de sources attestant de sa vaste érudition et de son souci de toujours faire part au lecteur de ses recherches les plus récentes à partir de documents méconnus ou inédits. C’est en cela que l’on reconnaît le grain d’un chercheur désireux de partager ses découvertes à un public des plus larges.
Refusant les lieux communs historiques, il a constamment invité à la réflexion sur des thématiques si rabâchées qu’elles en paraissaient indéniables. Ainsi, en 1982, il a amené les lecteurs du Journal des Savants à repenser Vauban au-delà des lieux communs entourant souvent ce personnage qui aurait tout pensé juste, tout prévu… De même, à l’occasion d’un colloque consacré en 1997 à la « Révolution militaire » occidentale (définie à partir des années 1950 par Michael Roberts pour la période s’échelonnant entre 1500 et 1800), il s’est fendu d’un propos inaugural critiquant le concept. Jean Chagniot a ainsi rappelé à ses collègues, élèves et amis à quel point il est indispensable de regarder avec méfiance les théories et concepts ornés qui peuvent devenir rapidement un carcan historiographique dont il serait malaisé de s’extirper, sans toutefois verser dans la remise en question gratuite se suffisant à elle-même.
On évoque souvent la connivence entre l’historien et certains sujets choisis. Ceux qui ont connu Jean Chagniot ne peuvent s’empêcher d’établir quelque parallèle entre lui et le chevalier de Folard, à qui il a consacré une belle étude intellectuelle en 1997. L’esprit critique et caustique acéré exprimé à des correspondants et amis pour aider ceux-ci à évoluer dans leur pensée et talents était propre aux deux personnages, même si la profonde humilité de Jean Chagniot le distingue nettement de Folard.
Peu avant sa retraite, Jean Chagniot a gratifié la collection « Nouvelle Clio » des PUF d’une juste prolongation de La Guerre au Moyen Âge de Philippe Contamine. Guerre et société à l’époque moderne (2001) ouvre des pistes qui inspirent encore de nos jours les chercheurs en histoire militaire. Presque deux décennies plus tard, ce livre reste un mètre-étalon de la recherche actuelle en histoire militaire.
Les années de retraite l’ont vu maintenir une activité constante jusqu’à sa dernière maladie. Jean Chagniot a tenu à partager jusqu’au bout le fruit de ses recherches, échangeant aussi bien avec des professeurs ayant repris le flambeau des études militaires et sociales (pensons à l’un de ses derniers articles publiés, cosigné avec Hervé Drévillon) qu’avec de jeunes étudiants et chercheurs désireux de suivre les traces qu’il a lui-même défrichées, au même titre qu’André Corvisier. Avec la disparition de Jean Chagniot se tourne la page d’un demi-siècle de recherches en histoire militaire, qui, néanmoins, ont suscité tant de vocations que le livre en est loin d’être clos.
Maître-assistant à Tours de 1969 à 1985, puis professeur des universités à Amiens de 1985 à 1990.
Jean Chagniot enseignée au lycée Michelet de Vanves jusqu’aux événements de Mai 1968. L’année d’après, devenu maître-assistant à Tours, il commence une thèse d’État sous la direction d’André Corvisier à la Sorbonne (Paris IV), soutenue en 1983 : Paris et l’armée au XVIIIe siècle : étude politique et sociale. Ce travail pose un jalon dans le renouveau de l’histoire militaire en France. Le rapport entre la capitale et l’armée y est développé en s’appuyant sur une grande diversité de sources, des archives notariales aux écrits du for privé. Jean Chagniot met en évidence l’évolution du recrutement des Gardes françaises et offre d’intéressantes clés pour la compréhension des événements de 1789, au cours desquelles ce régiment a eu une part non négligeable.
Pendant la conception de sa thèse, Jean Chagniot débute ses participations à des travaux ou fresques collectives, ainsi lorsqu’en 1973 paraît un petit livre de synthèse intitulé Les Temps modernes de 1661 à 1789. Ses premiers articles revisitent des thématiques souvent négligées ou plongées dans une imagerie d’Épinal. La Commission française d’histoire militaire avait abordé en 1973 la thématique de la peur chez le combattant. Quatre ans plus tard, Jean Chagniot publie un article sur la panique des Gardes-françaises à Dettingen (1743) dans la Revue d’histoire moderne et contemporaine, qui permet de mieux comprendre les raisons de la panique ainsi que des circonstances qui auraient transformé une victoire acquise d’avance en déroute.
La soutenance de sa thèse d’État permet à Jean Chagniot de devenir professeur à l’Université d’Amiens, où il a poursuivi sur ses thèmes de recherche mêlant l’histoire militaire à l’histoire de Paris. En 1988 paraît un volume de sa plume pour la « Nouvelle histoire de Paris ». Consacré au XVIIIe siècle et richement illustré, il y met en valeur l’intérêt pour les arts qui l’a constamment animé, ainsi que l’urbanisme, l’histoire culturelle, militaire et sociale. En 1990, c’est l’EPHE qui lui a ouvert ses portes, et où il a exercé son enseignement et ses directions de recherche jusqu’à sa retraite.
Histoire militaire ; Histoire des institutions ; Histoire urbaine ; Histoire de France ; Histoire moderne.
La contribution de Jean Chagniot au 2e tome de l’Histoire militaire de la France sous la direction d’André Corvisier (1992) le confirme dans sa place de dix-huitiémiste le plus important en histoire militaire. Le travail de synthèse fait aussi la part belle à l’utilisation de sources attestant de sa vaste érudition et de son souci de toujours exposer ses recherches les plus récentes à partir de documents méconnus ou inédits.
Refusant les lieux communs historiques, Jean Chagniot a constamment invité à la réflexion sur des thématiques si rabâchées qu’elles en paraissaient indéniables. En 1982, il amène les lecteurs du Journal des Savants à repenser Vauban au-delà des lieux communs entourant souvent ce personnage qui aurait tout pensé juste, tout prévu… À l’occasion d’un colloque consacré en 1997 à la « Révolution militaire » occidentale (définie à partir des années 1950 par Michael Roberts pour la période allant de 1500 à 1800), il se fend d’un propos inaugural critiquant le concept. Jean Chagniot rappelle à quel point il est indispensable de regarder avec méfiance les théories et concepts ornés qui peuvent devenir rapidement un carcan historiographique dont il serait malaisé de s’extirper, sans toutefois verser dans la remise en question gratuite se suffisant à elle-même.
On évoque souvent la connivence entre l’historien et certains sujets choisis. Ceux qui ont connu Jean Chagniot ne peuvent s’empêcher d’établir quelque parallèle entre lui et le chevalier de Folard, à qui il a consacré une belle étude intellectuelle en 1997. L’esprit critique et caustique acéré exprimé à des correspondants et amis pour aider ceux-ci à évoluer dans leur pensée et talents était propre aux deux personnages, même si la profonde humilité de Jean Chagniot le distingue nettement de Folard.
Jean Chagniot a gratifié la collection « Nouvelle Clio » des PUF d’une prolongation de La Guerre au Moyen Âge de Philippe Contamine. Guerre et société à l’époque moderne (2001) ouvre des pistes qui inspirent encore de nos jours les chercheurs en histoire militaire. Presque deux décennies plus tard, ce livre reste un mètre-étalon de la recherche actuelle en histoire militaire.
Jean Chagniot a tenu à partager jusqu’au bout le fruit de ses recherches, échangeant aussi bien avec des professeurs ayant repris le flambeau des études militaires et sociales (pensons à l’un de ses derniers articles publiés, cosigné avec Hervé Drévillon) qu’avec de jeunes étudiants et chercheurs désireux de suivre les traces qu’il a lui-même défrichées, au même titre qu’André Corvisier.
- Les Temps modernes de 1661 à 1789, Paris : PUF, 1973, 311 p.
- « Une panique : les Gardes françaises à Dettingen (27 juin 1743) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, janvier-mars 1977, p. 78-95.
- Paris et l’armée au XVIIIe siècle : étude politique et sociale, Paris : Economica, 1985, VII-678 p.
- Paris au XVIIIe siècle, Paris : Association pour la publication de l’histoire de Paris, Hachette, 1988, 587 p.
- Chapitres I à V du tome II de l’Histoire militaire de la France sous la direction d’André Corvisier, Paris : PUF, 1992, p. 3-128.
- « L’Image de Louvois chez ses contemporains et en particulier chez Quarré d’Aligny », dans Louvois, homme d’État et ministre de la Guerre, numéro spécial de Histoire, Économie, Société, 1996, n°1, p. 13-19.
- Le Chevalier de Folard, la stratégie de l’incertitude, Paris : Éditions du Rocher, 1997, 298 p.
- « L’Âge du capitaine : de la valeur au mérite », dans Regards su les sociétés modernes (XVIe-XVIIIe siècle) : Mélanges offerts à Claude Petitfrère, Tours : Publications de l’Université François Rabelais, 1997, p. 57-64.
- « Critique du concept de révolution militaire », dans La Révolution militaire en Europe (XVe-XVIIIe siècle), actes du colloque de Coëtquidan, 4 avril 1997, Paris : Économica, 1998, p. 23-29.
- « Le Camp de 1727 en Lorraine sous le comte de Belle-Isle », dans Camps et grandes manœuvres de Louis XIV à Louis-Philippe, actes du colloque de Compiègne, 3-4 octobre 1998, Bulletin de la Société historique de Compiègne 36 (1999), p. 61-70.
- Guerre et société à l’époque moderne, Paris : PUF, 2001, 360 p.
- [avec Hervé Drévillon], « La vénalité des charges militaires sous l’Ancien Régime », Revue historique de droit français et étranger 86 (2008), p. 483-522.