Back to top
Nom Stchoupak, Steinberg
Prénom Nadine
Naissance Vilna (mod. Vilnius, Lituanie, Russie) (10 février 1886)
Décès Paris (France) (30 novembre 1941)
Sections
Sciences historiques et philologiques
Sciences religieuses
Statuts et fonctions
Chargée de conférences
Direction d'études
(Associée à la direction d'études Sanskrit) (octobre 1937)
Date charge de conférences
octobre 1931 à octobre 1937
Distinctions
Chevalier dans l'Ordre des Palmes académiques (1934)
Prix Thorlet de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (1941)
Origines familiales

Nadine Steinberg, épouse Stchoupak (Nadejda Oséevna Ščoupak), appartient à une famille israélite de l'intelligentsia russe. Son père, Osiah Steinberg, hébraïsant renommé, est professeur et inspecteur de l'Institut pédagogique israélite. Son frère, Maximilien (1883-1946), est compositeur et devient le gendre de Rimski-Korsakov. Elle a pour maître l'historien russe Yevgeny Tarle (Eugène Tarlé) et fréquente les milieux politiques russes dès sa première jeunesse.

Situation de famille

Mariée à Samuel Stchoupak (1880-1944), puis séparée (vers 1930) ; mère d'un fils mort à 17 ans en 1924.

Études et formations

- Études secondaires à l'École supérieure pour femmes de Saint-Pétersbourg (Cours Beztoujev). N. Stchoupak suit les cours d'histoire du professeur E.V. Tarlé qui joua un rôle important dans sa vie. 
- Arrivée à Paris, en exil, en 1907 de sa Russie natale avec son mari Samuel, Nadine Stchoupak s'engage dans la voie de l'indianisme en se formant à l'EPHE, section des Sciences historiques et philologiques, où elle suit les conférences de Sylvain Lévi et Louis Finot, mais aussi du linguiste Antoine Meillet. En 1917, elle obtient le titre d'élève diplômée de la Section avec une thèse sur Le complément de nom dans le Śatapatha Brāhmaṇa (publiée dans les Mémoires de la Société de Linguistique tome 21). La thèse déposée lors de la séance du Conseil de la section SHP du 25 mars 1917 par Antoine Meillet a pour commissaires responsables Sylvain Lévi et Alfred Foucher.

Parcours professionnel, responsabilité à l'EPHE

Nadine Stchoupak, élève diplômée, est suppléante d'Alfred Foucher pour l'enseignement du sanskrit à la section des Sciences religieuses de 1931 à 1937 (statut équivalent à celui de chargé de conférences). Elle  y assure des lectures de textes de dharma (Lois de Manu et autres dharmaśāstra), de Purāṇa ou de poétique. La Kāvyamīmāṃsā de Rājaśekhara est l'un des traités qui retient son attention (voir Annuaire de la section des Sciences Religieuses, "Religions de l'Inde", années 1931 à 1937).
A la section des Sciences historiques et philologiques, de 1927 à sa mort, Nadine Stchoupak seconde activement Louis Renou dans l'enseignement de la grammaire sanskrite, assurant, bénévolement, des séances d'exercices pour les étudiants débutants "avec un dévouement et un talent pédagogique auxquels il convient de rendre hommage" (Annuaire 1928-29, p. 58). Ces enseignements ont lieu à l'Institut de civilisation indienne de l'Université de Paris, avec lequel l'EPHE travaille en étroite synergie. 
N. Stchoupak est, avec Jules Bloch, l'un des commissaires responsables pour la thèse de Jerzy Kurylowicz déposée par Antoine Meillet le 29 mars 1925. Avec Louis Renou, elle est l'un des commissaires responsables pour la thèse de Luigia Nitti, La première Śākhā du Prākṛtakalpataru de Rāmaśarman, déposée par Jules Bloch le 14 mars 1937 et publiée en 1939 dans la collection de la Bibliothèque de l'EPHE, Sciences historiques et philologiques n°273. 

Parcours professionnel hors EPHE

Secrétaire-bibliothécaire de l'Institut de Civilisation Indienne de l'Université de Paris (fondé par Sylvain Lévi en 1927), Nadine Stchoupak en est, aux yeux de tous, l'âme. A l'automne 1940, elle est démise de ses fonctions par effet des lois anti-juives et  en novembre 1941, elle doit se présenter pour l'enregistrement obligatoire des personnes juives auprès de la police française.

Domaines de recherches

Littérature sanskrite classique, recherches sur la poétique (littérature des alaṃkāraśāstra) et le vocabulaire technique de cette discipline.

Le travail préparatoire abondant effectué par Nadine Stchoupak pose les fondements de ce qui deviendra la traduction complète de la Kāvyamīmāṃsā (publ. 1946). Louis Renou écrit : "Une ébauche de traduction avait été préparée dès 1939 par les soins de Nadine Stchoupak, qui avait commencé aussi à rédiger des notes. J'ai repris l'ensemble, sans qu'il m'ait paru utile ni possible de distinguer sa part de la mienne. Je signalerai seulement que j'ai tiré profit des fiches que Mme Stchoupak avait élaborées en vue de décrire la terminologie des poéticiens sanskrits. Je suis heureux de publier ce texte, la dernière œuvre à laquelle ait travaillé cette noble femme, si lamentablement disparue, dont l'activité dans le domaine de nos études comme dans celui de l'entr'aide humaine laissera chez tous ceux qui l'ont connue d'impérissables souvenirs" (Introduction à la traduction de la Kāvyamīmāṃsā, 1946, p. 20).
Grande pédagogue, qui conçoit ou participe à la conception d'outils de travail destinés au sanskritiste francophone, Nadine Stchoupak est une travailleuse infatigable. Le dictionnaire sanscrit-français (1932), dont elle est le premier des trois auteurs, avec son amie indianiste Luigia Nitti (31.07.1903 - 1.1.1939) et de son maître Louis Renou, bénéficie ainsi "des fiches d'un lexique complet de Bhavabhūti qu'elle avait mis en oeuvre de longue date" (Avant-propos p. I). Sa Chrestomathie, exigeante, fournit à l'apprenant exercices de sandhi, phrases de thèmes et de versions et nombreux extraits de textes sanskrits en écriture devanāgarī, très bien choisis, le tout accompagné d'un vocabulaire français-sanskrit. L'introduction ouvrant la traduction annotée de l'Uttararāmacarita de Bhavabhūti (VIIIe s.), sommet du répertoire théâtral et de la poésie savante, est en réalité une étude littéraire documentée, et l'ensemble de l'ouvrage bien plus qu'une simple édition scolaire.

En 1941 l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres lui décerne le Prix Thorlet "pour ses longs services à l'Institut d'études indiennes et pour ses traductions d'ouvrages sanskrits".

 

 

Publications principales

Livres
- Le complément de nom dans le Śatapatha Brāhmaṇa, Mémoires de la Société de Linguistique de Paris 21, 1918 (38 p.).
- Nadine Stchoupak, Luigia Nitti et Louis Renou, Dictionnaire sanscrit-français, Paris, 1932.
- Uttararāmacarita  (La Dernière Aventure de Rāma). Drame de Bhavabhūti traduit et annoté par Nadine Stchoupak. Paris : Les Belles Lettres, 1re éd. 1935 (deuxième tirage 1968) - publié grâce à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
- Chrestomathie sanskrite, Paris, 1948 (84 p.).
- La Kāvyamīmāṃsā de Rājaśekhara. Traduite du sanskrit par Nadine Stchoupak et Louis Renou, Paris : Société Asiatique, 1946 (Cahiers de la Société Asiatique VIII).

Articles
- "L'Œuvre complet de Sylvain Lévi", Bibliographie par M. Maschino, Index par N. Stchoupak, dans Bibliographie bouddhique VII-VIII (1934-1936), Paris, 1937, p. 1-66. 
- "Luigia Nitti-Dolci", New Indian Antiquary vol. II n°1, avril 1939, p. 67-68.

Engagements

Nadine Stchoupak est "l'une des grands figures du milieu des intellectuels humanistes de gauche russes et européens" (Kaganovitch 2007, p. 251) et a toujours été une personnalité engagée. Dès l'adolescence, en Russie, elle prend part aux activités des cercles social-démocrates et entre notamment dans celui que dirige Solomon Schwartz (menchevik et activiste du Bund). Toute sa vie elle reste fidèle à ses convictions socialistes démocratiques et antitotalitaires.
En France, N. Stchoupak participe au Comité français des relations scientifiques avec l'Union Soviétique, et se montre très soucieuse de maintenir et développer les liens entre la France et l'URSS. Elle est traductrice du russe, participe aux séminaires de littérature russe d'André Mazon et ne ménage pas sa peine pour procurer des publications russes aux collègues français. Elle prête son concours à l'édition française du livre d'Eugène Tarlé, Le blocus continental et le Royaume d'Italie (Paris, 1928).Une correspondance suivie s'établit entre eux, notamment lorsque Tarlé est déporté à Alma-Ata en 1931. N. Stchoupak joue un rôle important dans l'organisation des protestations des intellectuels français contre la déportation de Tarlé, lesquelles aboutissent à son retour d'exil en 1932. 
Plusieurs publications de N. Stchoupak sont liées à ses engagements et ses idéaux politiques, parmi lesquelles :
- Karl Kautsky, Terrorisme et communisme, traduit de l'allemand par N. Stchoupak, Paris, 1921.
- Rosa Luxemburg, Lettres à Karl et Louise Kautsky, traduit de l'allemand par N. Stchoupak, Paris, 1925.
- "Les décembristes de Russie (1825)", Europe 36, 15 décembre 1925, p. 453-469.
Le nom de N. Stchoupak figure parmi ceux qu'énumère un pamphlet antisémite rédigé par un étudiant de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, présentant l'établissement comme un "ghetto" et N. Stchoupak comme "alter ego de Mme Brunschvicg" (c'est-à-dire Cécile Brunschvicg, épouse du philosophe Léon Brunschvicg, féministe qui participa au gouvernement de Léon Blum) – pamphet repris par Louis Ferdinand Céline dans un passage de L'école des cadavres.

Volumes d'hommage

Nadine Stchoupak 1886-1941. In memoriam. Plaquette de 39 p. publiée par l'Institut de Civilisation Indienne en 1945 (contient des textes de André Mazon, Louis Renou, Jules Bloch, Jean Filliozat, Anne-Marie Esnoul, L. Herzenstein, Antonia Nitti, J. et E. Marouzeau).

Publications au sujet de la personne

Boris Kaganovitch, "Nadine Stchoupak (1886-1941) disciple russe de Sylvain Lévi" dans Sylvain Lévi (1863-1935). Etudes indiennes, histoire sociale, sous la direction de Lyne Bansat-Boudon et Roland Lardinois, Turnhout : Brepols, 2007 (Bibliothèque de l'Ecole des Hautes Etudes, Sciences religieuses 130), p. 237-251.

Auteur de la notice
Nalini Balbir
Mise à jour
 le 16 mars 2018 - 13:44