Marcellin Berthelot est né place de Grève, au cœur du Paris révolutionnaire. Son père, Jacques Martin Berthelot, était un médecin de quartier républicain, lui-même fils de maréchal-ferrant, épris de justice, qui « soignait gratuitement la plupart de ses malades » (E. Renan). Il se démena lors de l’épidémie de choléra en 1832 et intervint auprès des blessés lors des émeutes des barricades dans les années 1830-1840. Il est connu pour ses recherches sur le choléra et les maladies pulmonaires.
marié à Sophie Niaudet (1837-1907), nièce de Louis Breguet
Baccalauréat ès lettres (1846)
Prix d'Honneur au concours général de philosophie des lycées de France (1848)
Baccalauréat ès sciences (1848)
Dès 1867, Marcellin Berthelot avait concouru par ses conseils à la fondation de "l'École des Hautes Études". En 1876, il prend la direction de la section de Physique et Chimie (IIe section) où il continue à expérimenter et, selon la mission de l’École, à promouvoir l’apprentissage de la recherche par la pratique expérimentale. Il recrute son préparateur, Camille Matignon. Entre 1889 et 1893, tous deux contribuent à déterminer, à l’aide de la bombe calorimétrique, les chaleurs de formation et de combustion des composés fondamentaux.
Professeur de chimie organique à l'École supérieure de Pharmacie (1859)
Professeur de chimie organique au Collège de France (1865)
Inspecteur général de l'enseignement supérieur (1876)
Membre fondateur de la Grande encyclopédie
Sénateur inamovible (1881)
Ministre de l’Instruction publique (1886-1887)
Ministre des Affaires étrangères (1895)
Marcellin Berthelot est avant tout un chimiste qui a révolutionné sa discipline. Depuis Lavoisier, la chimie était purement analytique : on identifiait les éléments simples constitutifs des êtres vivants, tels que l’hydrogène, le carbone ou l’eau, en les soumettant à des transformations permettant de les dissocier. En revanche, la formation des composés organiques biologiques complexes était réputée obéir à des « forces vitales mystérieuses » (Gerhardt, 1844). Berthelot infirme cette théorie en faisant exactement le contraire : à partir de chaleur et d’électricité, il réussit à synthétiser des composés organiques fondamentaux. Il est en ce sens l’inventeur de la chimie organique moderne. Mais il va plus loin en étudiant les lois de formation de ces composés en développant la thermochimie (grâce à sa bombe calorimétrique) et la mécanique chimique où il montre que les phénomènes observés se ramènent aux interactions des particules, c’est-à-dire des atomes – mais à l’époque la théorie atomiste était très contestée – et aux énergies (chaleur notamment) mises en jeu dans ces transformations.
En défenseur acharné de l'interdisciplinarité, Marcellin Berthelot s'intéresse à l'épistémologie. Il est passionné par l’histoire des sciences en Asie et au Moyen Orient. Il s’intéresse en particulier à l’alchimie et aux textes alchimiques anciens des penseurs grecs, syriaques et arabes qu'il va d'ailleurs traduire. C'est aussi un intellectuel, militant du positivisme, de la séparation de l'Église et de l’État, auteur d’ouvrages philosophiques qui interrogent les liens entre science, éducation et libre-pensée où il professe l'idée que, sans science, il n'y a pas de vraie philosophie (lettre à Renan, 1863).
1854 Combinaison de la glycérine avec les acides et reproduction des corps gras naturels
1860 Traité de chimie organique, 2 vol.
1864 Leçons sur les méthodes générales de synthèse en chimie organique
1872 Traité élémentaire de chimie organique, 2 vol.
1875 La synthèse chimique
1879 Essai de mécanique chimique fondée sur la thermochimie, 2 vol.
1885 Les origines de l’alchimie
1886 Science et philosophie
1889 Introduction à l’étude de la chimie des Anciens et du Moyen Âge
1890 La révolution chimique : Lavoisier
1893 Histoire des Sciences. La chimie au Moyen Âge, 3 vol.
1893 Traité pratique de calorimétrie chimique
1897 Science et morale
1897 Thermochimie. Données et lois numériques, 2 vol.
1901 Les carbures d’hydrogène
1901 Science et éducation
1905 Science et libre pensée
1906 Archéologie et histoire des sciences
1906 Traité pratique de l’analyse du gaz
Marcellin Berthelot est le type même du « grand homme » tel que défini au XIXe siècle : à la fois homme de science et homme d’État, mais aussi homme public, laïc, républicain de gauche et défenseur de la démocratie. Savant positiviste, il enseigne dans une période où la confiance dans le progrès scientifique est à son apogée et où la science, capable d’expliquer de nombreux phénomènes, devient utile à la société. Fidèle à la stature du « grand homme », Berthelot restera un grand défenseur de l’interdisciplinarité où sciences sociales et politiques, humanités et sciences dures se côtoieront en permanence.
Marcel Chaigneau, « Le pharmacien Marcelin Berthelot et la pharmacie », Revue d'histoire de la pharmacie, 80e année, n°292, 1992, p. 7-13.
Laurence Lestel (coord.), Itinéraires de chimistes. 1857-2007 : 150 ans de chimie en France. EDP Sciences, janvier 2008.
Carjes Bédel, « La vie de Berthelot », Revue d'histoire de la pharmacie, vol. 138, 1953, p. 97-101.