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Georges Teissier
Nom Teissier
Prénom Georges
Naissance Paris (France) (19 février 1900)
Décès Roscoff (France) (07 janvier 1972)
Sections
Sciences naturelles et physiologie
Statuts et fonctions
Directeur de laboratoire
Directions d'études
Directeur du laboratoire de Biométrie Animale de l'EPHE (septembre 1937 à septembre 1945)
Directeur du laboratoire de Biométrie Animale et Zoologie Expérimentale de l'EPHE (octobre 1945 à juillet 1967)
Distinction Membre de l'Académie des Sciences (1967)
Origines familiales

Georges Teissier est originaire d’une famille d’enseignants cévenols. Sa femme, Lise Bruhl, est la petite-fille du grand rabbin de France Zadoc Kahn et la nièce de Lucien Lévy-Bruhl. Son beau-frère est Jacques Monod, époux d'Odette Bruhl. Cousin de Claude Levi, Professeur de Zoologie au Muséum National d’Histoire Naturelle et premier directeur du département des sciences de la vie du CNRS.

Laboratoire
Laboratoire de Biométrie animale de l'EPHE à l'ENS
Laboratoire de Biométrie animale et zoologie expérimentale de l'EPHE à Paris et Roscoff
Parcours professionnel, responsabilité à l'EPHE

Le 14 décembre 1937, l’EPHE crée pour lui le laboratoire de "Biométrie animale" à l’Ecole normale supérieure, alors qu’il est maître-assistant à la Sorbonne. Lors de la même session, elle crée le “laboratoire de génétique” pour Boris Ephrussi. L’EPHE sera ainsi la première institution française à soutenir des généticiens. En 1945, le laboratoire de Teissier est rebaptisé "Biométrie animale et zoologie expérimentale", établi à Paris et Roscoff.

Parcours professionnel hors EPHE

Après la guerre, Teissier poursuit une carrière brillante comme professeur à la Faculté des sciences. Directeur-adjoint de Joliot-Curie au CNRS en 1945, puis directeur du CNRS de 1946 à 1950, il établit le campus CNRS de Gif-sur-Yvette, principalement dédié à la génétique. Malgré une santé fragile, il est simultanément directeur de trois laboratoires : le laboratoire de zoologie de la Sorbonne (ensuite déménagé au quai Saint-Bernard), le laboratoire de Biométrie et génétique évolutive de Gif-sur-Yvette, et la station biologique de Roscoff, qu’il agrandit considérablement. Georges Teissier a été élu à l'Académie des Sciences en 1967.

Domaines de recherches

Georges Teissier est, avec son collaborateur Philippe L’Héritier, le fondateur de la recherche génétique en France, et le fondateur de la génétique des populations expérimentales dans le monde. À ce titre, il figure parmi les inspirateurs de la synthèse moderne néo-darwinienne qui a mis fin à l’"éclipse du darwinisme" (1882-1942), soixante années au cours desquelles la majorité des biologistes évolutionnistes rejetaient la théorie de la sélection naturelle de Darwin. Avec ses élèves (Charles Bocquet, Claudine Petit, Maxime Lamotte), il a introduit le darwinisme dans la recherche scientifique en France.

Teissier est d’abord biométricien et s’intéresse dès 1924 à l’expression mathématique de la croissance relative des organismes et des modèles démographiques. Il crée en 1936 avec le britannique Julian Huxley la notion d’"allométrie" en morphométrie, et ses conseils permettent à Jacques Monod de mettre en évidence pour la première fois pendant sa thèse l’effet de la régulation génétique sur les populations bactériennes.

Le mendélisme existe depuis 1900, mais les débuts prometteurs de la recherche génétique en France (avec Cuénot sur les rongeurs et Vilmorin sur les plantes) se sont arrêtés sous l’influence du néo-lamarckisme et se limitent à des techniques d’agronomie. Philippe L’Héritier (1906-1994), issu comme Teissier de l’ENS, revient en 1932 d’un an de stage aux États-Unis où il a découvert les modèles mathématiques de la sélection naturelle des théoriciens Ronald Fisher, Sewall Wright et J.B.S. Haldane. Avec Teissier il construit un dispositif expérimental (le "démomètre") destiné à vérifier la théorie sur les drosophiles. Ils découvrent le paradoxe du maintien du polymorphisme génétique. Ils découvrent aussi par hasard le premier cas de gène transmis par voie « cytoplasmique » dite aussi « hérédité non-mendélienne », causé par le virus sigma, responsable de la sensibilité des drosophiles au gaz carbonique.

Après la guerre, Teissier est à l’origine de l’école française de génétique des populations, qui étudie les causes du maintien du polymorphisme. Jusqu’à sa mort en 1972, il sera en butte à l’opposition des néo-lamarckiens français, dont le zoologiste Pierre-Paul Grassé (également directeur de laboratoire EPHE) est alors la figure marquante.

Teissier mène parallèlement une carrière de zoologiste, comme spécialiste des hydrozoaires. Il lui consacre pratiquement tous ses étés, passés à la station biologique de Roscoff. Il correspond avec Hiro-Hito, empereur du Japon, lui-aussi spécialiste de ce groupe d’invertébrés marins. Il le rencontre personnellement en 1956 au Japon, en marge du congrès international de génétique. L’empereur lui rend la politesse en 1971 en marge d’une visite en France.

Publications principales

L'Héritier, P. et Teissier, G., 1933. “Etude d'une population de Drosophiles en équilibre”, C.R. Acad. Sc., 197 : 1765-1767.

L'Héritier, P. et Teissier, G., 1934. “Une expérience de sélection naturelle, Courbe d'élimination du gène Bar dans une population de Drosophila melanogaster” , C.R. Soc. Biol., 117 : 1049.

Huxley, J. S. and Teissier, G., 1936. “Terminology of relative growth”. Nature, 137 : 780-781.

L'Héritier, P., Neefs , Y., Teissier, G., 1937. “Aptérisme des insectes et sélection naturelle”, C.R. Ac. Sc., 204 : 907-909.

L'Héritier, P. et Teissier, G. 1937a. “Elimination des formes mutantes dans les populations de Drosophiles. Cas des Drosophiles bar”, C.R. Soc. Biol., 124 : 880-882.

L'Héritier, P. et Teissier, G. 1937b. “Une anomalie physiologique héréditaire chez la Drosophile” C.R. Acad. Sc., 205 : 1099-1101.

L'Héritier, P. et Teissier, G. 1938a. “Transmission héréditaire de la sensibilité au gaz carbonique chez la Drosophile”, C.R. Ac. Sc., 206 : 1683-1685.

L'Héritier, P. et Teissier, G. 1938b. “Un mécanisme héréditaire aberrant chez la Drosophile”, C.R. Ac. Sc., 206 : 1193-94.

Teissier Georges 1934. “Dysharmonies et discontinuités dans la croissance”, Paris, Hermann.

Teissier, G., 1942. “Persistance d'un gène léthal dans une population de Drosophiles”, C.R. Ac. Sc., 214 : 327.

Teissier, G., 1943. A”pparition et fixation d'un gène mutant dans une population stationnaire de Drosophiles”, C.R. Acad. Sc., 216 : 88-90.

Teissier, G., 1945. “Mécanisme de l'évolution”, La Pensée, 2 : 3-19 ; 3 : 5-31.

Teissier, G., 1947a. “Variations de la fréquence du gène sepia dans une population stationnaire de Drosophiles”, C.R. Acad. Sc., 224 : 676-677.

Teissier, G., 1947b. “Variations de la fréquence du gène ebony dans une population stationnaire de Drosophiles”, C.R. Acad. Sc., 224 : 1788-1789.

Teissier, G., 1954. “Sélection naturelle et fluctuation génétique”, C.R. Ac. Sc., 238 : 1929-1931.

Teissier, G., 1957. “Discriminative Biometrical Characters in French and Japanese Drosophila melanogaster”, Proceedings of the International Genetics Symposia, 1956 : 502-505.

Teissier, G., 1962. “Transformisme d'aujourd'hui”, L'Année biologique, 4è série, 1: 359-375.

Engagements

Pendant la guerre, son collègue Marcel Prenant (professeur de zoologie à la Sorbonne et directeur de laboratoire EPHE), chef d’état-major des Francs-tireurs et partisans (organe de la résistance communiste), chargé des relations avec les gaullistes, le recrute comme adjoint. Les FTP sont dirigés sur le terrain par Rol-Tanguy et constituent le principal groupe de maquisards français. Teissier remplace Prenant après son arrestation par l’armée allemande en 1944 et cosigne l’ordre d’insurrection de Paris le 22 août 1944.

Entre 1948 et 1950, l’URSS promeut des thèses de l’agronome soviétique Lyssenko, qui dénonce la génétique comme « science bourgeoise ». Elle prend à contre-pied les communistes occidentaux, largement favorables au mendélisme, et qui dénonceront le lyssenkisme comme fausse science. Monod et Haldane (britannique) rendent leur carte ; Prenant démissionne du Comité Central (formellement le PC refuse sa démission puis l’exclut). Teissier, directeur du CNRS, se contente de transmettre à l’URSS la proposition de Boris Ephrussi de vérifier en conditions contrôlées en France, au laboratoire du « phytotron » de Gif-sur-Yvette, les expériences censées réfuter le mendélisme avec les lignées de Lyssenko. Une telle expérience sera réalisée, mais dans des conditions contrôlées politiquement dans un autre laboratoire, et ne donnera rien. C’est en plein éclatement de la guerre froide que le PC ajoute le nom de Teissier à une liste de signataires d’une pétition attaquant le ministre de l’éducation nationale Yvon Delbos, son ministre de tutelle. Bien que non-signataire, Teissier laisse faire et est évincé de la direction du CNRS à l’occasion d’une retentissante campagne de presse en 1950, l’« affaire Teissier ».

Directeur du CNRS, il se voit décerner d’office la Légion d’honneur, mais comme communiste, refuse qu’on la lui remette.  Elle lui est envoyée par la poste. L’auteur de cette notice l’a retrouvée dans son laboratoire, dans son pli d’origine ouvert, en 1998, soit vingt-six ans après sa mort, et près d’un demi-siècle après son envoi.

Publications au sujet de la personne

Gayon, Jean. 1999. “History of Allometry”, in Fundamental Changes in Cellular Biology in the 20th Century - Biology of Development, Chemistry and Physics in the Life Sciences, Proceedings of the XXth International Congress of History of Science (Liège, 20-26 July 1997), ed. by Charles Galperin, Scott F. Gilbert and Brigitte Hoppe, Turnhout (Belgium), Brepols: 151-157.

Gayon, Jean. 2000. “De la croissance relative à l'allométrie (1918-1936)”, Revue d'histoire des sciences, n° spécial Aspects du développement dans la biologie du XXe siècle, 53: 475-498.

Gayon, Jean. 2000 “History of the Concept of Allometry”, American Zoologist 40: 748-758.

Gayon, Jean and R. M. Burian 2000  “France in the Era of Mendelism” (en coll. Avec), in 1900 : Redécouverte des lois de Mendel (ed. J. Gayon, F. Gros, M. Morange & M. Veuille), Comptes Rendus de l'Académie des Sciences, Série des sciences de la vie, 323: 1097-1106.

Gayon, Jean and Veuille, Michel. 2001 “The Genetics of Experimental Populations : L'Héritier and Teissier's Populations Cages”, en coll. avec M. Veuille, in Thinking about Evolution : Historical, Philosophical, and Political Perspectives, R. Singh, C. Krimbas, D. Paul, J. Beatty (eds.), Cambridge (UK), Cambridge University Press, 2001: 77-102.

Gayon, Jean. 2014      “Une expérience de sélection naturelle en conditions naturelles : L’Héritier, Neefs et Teissier, 1937”, in L. Loison, éd.), Le laboratoire CNRS de génétique évolutive de Gif. De part et d’autre de l’œuvre d Georges Tessier, Paris, Hermann: 65-80.

Gayon, Jean. 2015 « Biométrie et génétique des populations. Échanges franco-britanniques dans l’entre-deux guerres », Bulletin d’histoire et d’épistémologie des sciences de la vie, 23-1: 7-26.

Loison, Laurent. 2013. Georges Teissier (1900–1972) and the Modern Synthesis in France. Genetics  195:  295-302

Toulmond, André. 2005. Georges Teissier (1900-1972) : images et documents. <http://www.sb-roscoff.fr/sites/www.sb-roscoff.fr/files/documents/station...

Les archives Teissier, confiées par Michel Veuille au SCDBA (Service commun de documentation bibliothèques et archives) de l’EPHE, sont désormais disponibles au Grand équipement documentaire du Campus Condorcet.

Auteur de la notice
Michel Veuille
Mise à jour par
maj Sylvie Demignot le 04 janvier 2020 - 16:20