Son père, originaire de Pologne, est arrivé à Bruxelles en août 1945, après six années de captivité dans les Stalags, et autant d’évasions. Après avoir exercé différents métiers, il est entré dans l’administration parapublique belge. Sa mère, issue d’une famille de négociants en cuirs et d’ouvriers, a fait carrière dans la fonction administrative à l’Université Libre de Bruxelles. Son frère aîné est écrivain et réalisateur, sa sœur aînée, employée administrative à l’Université Libre de Bruxelles. Danouta Liberski vit en France depuis 1979. Elle a reçu la nationalité française en 2002. Son conjoint est cadre de santé en psychiatrie. Ils ont deux enfants.
Après des études secondaires en latin-grec, puis en latin-sciences à Bruxelles (1967 à 1973), Danouta Liberski obtient une licence et une maîtrise en Sciences sociales à l’Université Libre de Bruxelles (1973-1978) sous la direction de Luc de Heusch. À Paris, elle se forme à l’ethnologie africaniste en suivant les enseignements de Michel Cartry (EPHE, Ve section), de Michel Izard (EHESS), de Claude Tardits (EPHE), et s’initie au Bambara à l’INALCO auprès de Gérard Dumestre. Elle suit également le cours de Claude Lévi-Strauss au Collège de France. À partir de 1981, elle effectue de nombreux séjours au Burkina Faso (région kasena) où elle fait l’apprentissage de la langue et s’instruit d’après la pensée kasem sur les rites et les institutions. Après un DEA en ethnologie à l’Université de Paris 7 (1982), elle intègre le laboratoire Systèmes de pensée en Afrique noire dirigé par Michel Cartry, et participe aux différents ateliers de recherche, ouvrant et animant certains d’entre eux dès 1984. Tout en étant employée (Centre culturel, 1980-1985, Bureau de change, 1988-1992), elle soutient en 1991 un doctorat de l’EPHE, Les dieux du territoire. Unité et morcellement de l’espace en pays kasena, qui reçoit un prix de l’Académie Royale de Belgique. En 2002, après la présentation de ses travaux sous le titre Rites, pensée, société, elle obtient une habilitation à diriger des recherches de l’Université de Paris X Nanterre.
Dès 1984, elle rejoint à l’invitation de Michel Cartry la vaste enquête comparative sur les polythéismes des sociétés anciennes et des sociétés traditionnelles conduite par Marcel Detienne, dans la voie frayée par Jean-Pierre Vernant. Recherche collective de longue haleine qui s’est poursuivie dans différents cadres institutionnels jusqu’en 2008 (ATP Les polythéismes, GDR Anthropologie comparée du champ religieux, équipe de l’EPHE Pratique des polythéismes), à laquelle elle a eu l’honneur de contribuer.
- Chargée de Conférence, rattachée à la direction d'études Religions d’Afrique Noire de 1998 à 2002.
- Accréditée auprès de l’École doctorale « Religions et systèmes de pensée » depuis 2006.
2012 -2015 : Chercheur Résident associé, Institut d’Études avancées de Nantes.
2011 : Directrice de recherche CNRS, Institut des mondes africains, UMR 8171 aux six tutelles (CNRS, EPHE, EHESS, Université de Paris 1, Université de Provence, IRD), Paris.
2009 : Chercheur Résident. Institut d’Études avancées de Nantes.
2006-2008 : Chercheur en expatriation. Institut de Recherche pour le développement, Centre de Ouagadougou, Burkina Faso.
1995 : Chercheur/Responsable d’équipe, Laboratoire 221, associé à l’EPHE, Systèmes de pensée en Afrique noire, Paris.
1993 : Chargée de recherche 1re classe CNRS, Centre de recherche en linguistique et sémiologique, Lyon.
1982-1993 : Membre non statutaire / Responsable d’Ateliers de recherche au LA 221, laboratoire du CNRS associé à l’EPHE, Systèmes de pensée en Afrique noire, Paris.
La recherche de Danouta Liberski porte sur les configurations de pensée qui pénètrent les systèmes de rites dans les sociétés traditionnelles de l’aire voltaïque (Afrique de l’ouest). Elle exerce cette « comparaison du proche » à partir de son terrain auprès des Kasena du Burkina Faso et du nord du Ghana. Ses questionnements tournent autour des fictions rituelles qui viennent soutenir les principales institutions qui organisent la vie quotidienne de ces sociétés (Parenté, Gardiens de la Terre, Chefferie, Divination). Privilégiant l’analyse des catégories de langue et de pensée que mobilise l’activité cérémonielle, elle a notamment étudié les montages rituels qui façonnent, articulés l’un à l’autre, le réseau des liens de parenté et le rapport de tous et de chacun au sol et à la terre. Elle a montré que ces montages reposent sur le principe anthropologique, forclos dans les sociétés occidentales depuis l’ère du machinisme industriel, selon lequel, pour l’animal humain, habiter implique le marquage rituel d’un « territoire-corps ». Conçu comme un assemblage articulé de « lieux-peaux » (mobiles) dont les villageois sont « les enfants », le territoire d’un village ouest africain offre ainsi à chacun de ses membres des espaces généalogisés où se reproduire comme « être du village » est pensable. Dans un récent prolongement de ces études, elle a mis en regard les fictions juridiques qui soutiennent l’institution de la propriété privée foncière et qui permettent d’envisager la terre comme un bien qui se loue, se vend, s’exploite et se détruit, et les fictions rituelles des sociétés traditionnelles africaines qui construisent la Terre comme une instance souveraine.
Elle a conduit d’autres recherches sur l’espace du dire oraculaire, le temps dans le rite, la figure du meurtrier, la construction des liens de parenté et des puissances ancestrales au décours des funérailles.
Livres ou chapitre de livres
« Terre souveraine, terres cadastrées », in Renée Koch-Piettre, O. Journet, D. Liberski-Bagnoud (éd.), Mémoires de la Terre, Ed. Jérôme Million, 2019, p. 371-394.
« Le travail vu au prisme du rituel », in P. Muso et A. Supiot, Qu’est-ce qu’un régime de travail réellement humain ?, Paris : Hermann, 2018, p. 161-178.
« Règne de la loi, régime des interdits », in G. Longo, Loi des dieux, des hommes et de la Nature : éléments pour une analyse transversale, Paris : Spartacus, 2017, p. 39-60.
« Langues africaines (Burkina Faso) kasim, moore et gulmancema », in Pierre Legendre (dir.), Tour du monde des concepts, Paris : Fayard, 2014, p. 77-133.
« Les Gardiens de la Terre. La notion de responsabilité dans les systèmes rituels voltaïques », in A. Supiot et M. Delmas-Marty (dir.), Prendre la responsabilité au sérieux, Paris : PUF, 2015, p. 55-72.
« Incertitude ordinaire et divination dans les sociétés traditionnelles », in M.-H. Soulet (éd.), Action et incertitude. Les épreuves de l’incertain, Bâle : Schwabe Verlag, 2018, p. 213-233.
« Les formes africaines de la solidarité » in A. Supiot (dir.), La solidarité. Enquête sur un principe juridique, Paris, Odile Jacob, 2015, p. 167-181.
« Le sac des devins kasena et de quelques autres », in C. Jacob (éd.), Lieux de savoir. Les mains de l'intellect, Section 1. Ergonomie, Paris : Albin Michel, 2011, p. 38-58.
« D’une forme donnée à l’absence », in Michel Cartry, J.-L. Durand, et R. Koch Piettre (éd.), Architecturer l’invisible. Autels, ligatures, écritures. Louvain : Brepols (BEHE-SR 138), 2010, p. 231-260.
Les dieux du territoire. Penser autrement la généalogie. Paris : Editions du CNRS, 2002.
(avec M. Cartry) « D’une fondation sans fondateur » in Marcel Detienne (éd.), Tracés de fondation, Louvain-Paris : Peeters (BEHE-SR 93), 1990 : 85-140.
D. Liberski (éd.), Le deuil et ses rites III, Systèmes de pensée en Afrique noire 13 (1994), p. 185-216.
Articles
« La face inappropriable de la Terre. Une autre façon d’instituer le rapport au sol et aux choses », Revue Juridique de l’Environnement, n° spécial, Le bon usage de la terre : Penser le Droit dans une planète finie, 2018, p. 43-54.
« Michel Cartry et la question de l’espace-corps », in Comparer les systèmes de pensée. A la mémoire de Michel Cartry, Paris : EPHE, Systèmes de pensée en Afrique Noire 19 (2016), p. 43-65.
« La chorégraphie du bâton divinatoire comme écriture sonore », Gradhiva 15 (2012), p. 183-199.
« L’espace du dire oraculaire. Aperçu comparatif d’un lieu d’où peut surgir une parole vraie », In Le chemin du rite. Autour de l'œuvre de Michel Cartry, Paris : Ed. du Félin, 2010 : 109-148.
« La lame du couteau et la mort amère. Violence funéraire, initiation et homicide en pays kasena » in Michel Cartry et Marcel Detienne (éd.), Destins de meurtriers, Systèmes de pensée en Afrique noire 14 (1996), p. 211-250.