Katia Buffetrille

Le premier terrain d’enquête de Katia Buffetrille a été le Népal où elle se rend régulièrement depuis 1974, puis le Tibet (Région autonome, Kham et Amdo) où elle effectue sa première mission en 1985, date de l’ouverture du pays aux étrangers. Elle fait chaque année une enquête de terrain d’environ trois mois.

Dès le début de ses études, son intérêt porte sur les rituels, essentiellement sous leurs aspects les moins bouddhisés :

Sa maîtrise sur Le mariage par vol dans quelques sociétés tibéto-birmanes montre que cette forme d’union n’était nullement rare ni fortuite, et s’expliquait par une organisation politique particulière, archaïque, propre à ces sociétés.

Dans Montagnes sacrées, lacs et grottes : lieux de pèlerinage dans le monde tibétain (objet de sa thèse), elle développe et explique le concept de bouddhisation des montagnes « dieux du terroir ». Ancêtres mythiques de territoires particuliers et des populations qui les habitent, pourvoyeurs de biens terrestres, leur culte constituait traditionnellement l’acte fondateur d’une communauté politique, mais réclamait des sacrifices sanglants. Une fois ces montagnes transformées en « montagnes lieux saints » sous l’influence du bouddhisme, le dévot en effectue la circumambulation dans le but d’obtenir des mérites pour améliorer sa vie ici-bas et sa future réincarnation. Cette recherche a aussi mis en lumière les nombreuses conséquences de cette transformation qui, loin d’être achevée, se poursuit activement de nos jours. K. Buffetrille s’est donc intéressée aux dimensions contemporaines de ce phénomène et a étudié les changements que connaissent ces pèlerinages sous l’influence des diverses politiques coloniales menées par la République populaire de Chine, et sous l’effet de la modernisation et du processus de bouddhisation.

Son approche à la fois synchronique et diachronique lui a permis d’observer l’évolution et les changements de cette pratique religieuse toujours essentielle au Tibet pour la vie spirituelle des Tibétains.

Tout en poursuivant ses recherches sur les pèlerinages, elle s'est aussi intéressée à un rituel particulier de l'Amdo (nord-est du Tibet), le glu rol, rite non-bouddhique dédié aux divinités locales. Au fil des ans, un certain nombre de ses éléments ont été plus ou moins bouddhisés et la présence de moines est acceptée depuis peu. L’analyse de K. Buffetrille montre que ce rituel représente et (re)crée le monde tel qu’il était conçu traditionnellement par les Tibétains : la terre selon un schéma carré orienté, combiné à un  triple étagement vertical avec les dieux en haut, les hommes au milieu et les divinités aquatiques, dans le monde souterrain.

Les travaux de K. Buffetrille sur le Tibet contemporain portent également sur des pratiques et rituels nouveaux tels que les versions contemporaines des danses illustrant l’épopée de Gesar, le végétarisme – exceptionnel auparavant – et les auto-immolations par le feu.