Issu d'une famille aristocratique et fortunée, arrière-petit-fils de l'archéologue, ethnologue et anthropologue Augustus Pitt Rivers (qui fonda le Pitt Rivers Museum à Oxford), il était le fils de l'anthropologue Georges Henry Lane-Fox Pitt-Rivers et de sa première épouse l'actrice Emily Racher Forster, fille du premier Baron Forster qui avait été gouverneur général de l'Australie.
Son père, eugéniste (correspondant avec l'Allemand Eugen Fischer), antibolchevique et antisémite (il appartenait au mouvement fascite des Moseley-ites), fut pour ces raisons enfermé à la Tour de Londres de 1940 à 1942. Par son œuvre et ses positions, Julian Pitt-Rivers tâcha de se démarquer de ce père.
Marié avec l'actrice Pauline Laetitia Tennant (1946-1953), puis avec Margarita Larios y Fernandes di Villavicencio (1955-1971) et enfin, dès 1971, avec Françoise Geoffroy, qui le soigna avec dévouement au cours des cinq dernières années où il sombra dans la maladie.
Petite enfance en Australie, études secondaires au Collège d'Eton.
Études supérieures successivement à Grenoble (1936, langue et littérature françaises), à Paris (École libre des sciences politiques, 1937-1939) et au Worcester College d'Oxford.
Cursus interrompu par la Seconde Guerre Mondiale où il sert dans les Royal Dragoons en de multiples pays d'Afrique du Nord et d'Europe et obtient le grade de capitaine. Il est ensuite deux ans chargé d'instruire à Bagdad le futur roi Fayçal d'Irak : une expérience de l'altérité culturelle décisive dans son orientation vers l'anthropologie. Il retourne à Oxford en 1947 pour y préparer une thèse d'anthropologie méditerranéenne. Il a pour professeurs Meyer Fortes ou E.E. Evans-Pritchard.
De 1949 à 1952, dans l'Espagne encore écrasée par les séquelles de la guerre civile et la police franquiste, il mène une étude de terrain à Grazalema en Andalousie. Il soutient en 1953 sa thèse qui paraît l'année suivante sous le titre People of the Sierra.
Il entreprend ensuite une étude de terrain dans le Quercy, interrompue par des invitations aux États-Unis.
Directeur d'études associé en anthropologie sociale, 1964-1971, sur l'invitation de Claude Lévi-Strauss. Participe aux enseignements du Centre de Perfectionnement qui prépare au travail de terrain.
Directeur d'études en "Ethnologie religieuse de l'Europe" de 1980 à 1986.
1956-1957 : visiting assistant professor à Berkeley (invitation de l'anthropologue George Foster)
1957-1969 : visiting professor à mi-temps à Chicago (invitation de Robert Redfield)
1960-1962 : co-directeur (avec Norman McQuown) du projet universitaire sur le Chiapas à Mexico ; puis recherches de terrain en Amérique centrale et Amérique du Sud.
1971 : Professeur d'anthropologie (chaire de Malinowski et de Raymond Firth) à la London School of Economics ; co-dirige avec Ioan Myrddin Lewis le département d'anthropologie.
1977 : reprend un poste en France, où il n'a pas cessé d'habiter : il enseigne successivement à Aix-en-Provence, à Nanterre et à l'EPHE (chaire d'ethnologie de l'Europe).
1986 : prend sa retraite et continue ses recherches, notamment sur la tauromachie qui commence à être fort décriée en Europe.
Que la méthode anthropologique puisse concerner des sociétés "avec écriture" jusque-là seulement objets d'histoire, c'était une vraie révolution des mentalités universitaires, qui eut besoin d'un détour par les États-Unis pour être finalement acceptée en Europe. Il aura fallu à J. Pitt-Rivers une grande indépendance d'esprit pour poursuivre si obstinément la carrière que sa riche expérience lui avait permis d'embrasser (voir en général sur la question B. Baskar, "L'anthropologie sociale dans ‘l'autre Europe’", Terrain 1998, p. 113-128). Il participa ainsi avec son ami Juan Caro Baroja à la naissance de l'anthropologie espagnole, à partir de ses recherches en Andalousie où se conservaient des traits d'un passé arabe – un univers méditerranéen dont il avait gagné dans sa jeunesse une intime connaissance. Un moment décisif dans l'établissement d'un espace comparatif élargi à l'ensemble de la Méditerranée fut la conférence "Rural peoples of the Mediterranean" financée par le mécénat américain en 1959, et publiée par J. Pitt-Rivers en 1963 sous le titre Mediterranean Countrymen: y participaient ceux qui, de son fidèle collaborateur John G. Peristiany surtout, anthropologue de la Grèce contemporaine, à Pierre Bourdieu, poursuivirent cette aventure. Dans la lignée de W. Robertson Smith il soumit la Bible à l'analyse anthropologique dans sa lecture de l'aventure de Sichem en Gn 34 ou avec l'étude de la circoncision jusqu'à son interprétation contemporaine.
Son analyse des valeurs de l'honneur et de la grâce, ou encore du compérage comme parenté rituelle, au fondement de l'institution de la parenté et des genres dans les pays méditerranéens, ou son constat d'une hétérogénéité des cultures en Europe en-deçà des oppositions nationales et religieuses, parallèlement à des traits communs à l'espace de la Méditerranée, voire sa défense du rôle symbolique de la corrida, lui valurent bien des incompréhensions.
- - The People of the Sierra (préface de E. E. Evans Pritchard), Londres, 1954.
- - « Mana », Inaugural Lecture, The London School of Economies and Political Science, Londres, 1974, p. 1-34.
- - The Fate of Shechem or The Politics of Sex. Essays in the anthropology of the Mediterranean, Cambridge, 1977 (trad. franc. Anthropologie de l'honneur. La mésaventure de Sichem, Paris, 1983).
- - « Le sacrifice du taureau », Le Temps de la réflexion, 1983, p. 281-297.
- - « Mariage par rapt », dans J. Peristiany (éd.), Le prix de l'alliance en Méditerranée, Paris, CNRS, 1989, p. 53-71.
- « Sainte Véronique, patronne des arènes », Gradhiva, 16, 1994, p. 85-92.
- Ouvrages collectifs (direction, co-direction, introduction et contributions)
- - Mediterranean countrymen : essays in the Social Anthropology of the Mediterranean, La Haye-Paris, 1963.
- - Ensayos de Antropologia en la zona central de Chiapas, Mexico, 1970 (avec Norman McQuown).
- - « Anthropologie méditerranéenne » (avec B. Kayser), dans B. Kayser (éd.), Les sociétés rurales de la Méditerranée. Recueil de textes anthropologiques anglo-américains, Aix: Edisud, 1986, p. 5-22.
- - J. G. Peristiany & J. Pitt-Rivers (éd.), Honor and Grace in Anthropology, Cambridge : Cambridge U.P., 1992 (cf., J.G. Peristiany éd., Honour and Shame: the Values of the Mediterranean Society, Chicago, 1966).
- - Les amis et les autres: mélanges en l'honneur de John Peristiany = Brothers and others : essays in honour of John Peristiany, Textes réunis par Stathis Damianakos, Marie-Elisabeth Handman, Julian Pitt-Rivers [et al.], Athènes: Centre national de recherches sociales, 1995.
Honorio M. Velasco (coord.), La antropología como pasión y como práctica. Ensayos in honorem Julian Pitt-Rivers, Madrid, Consejo Superior de Investigaciones Científicas, 2004, 418 p.
Giordana Charuty, "Julian Pitt-Rivers (1919-2002)" [sic], Annuaire de l'EPHE, Sciences religieuses, 114, 2001, p. 17-19 [http://www.persee.fr/doc/ephe_0000-0002_2001_num_114_110_11883]
http://www.theguardian.com/news/2001/sep/14/guardianobituaries.socialsciences
Dominique Fournier, « Pitt-Rivers Julian - (1919-2001) ». In Universalis éducation [en ligne]. Encyclopædia Universalis, consulté le 3 mai 2017. Disponible sur http://www.universalis-edu.com.janus.biu.sorbonne.fr/encyclopedie/julian-pitt-rivers/
Voir les archives Pitt-Rivers à la Bibliothèque du Laboratoire d'ethnologie et de sociologie comparative, Maison René Ginouvès, Paris X-Nanterre.